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Financé par plusieurs partenaires et institutions de financement du développement, dont Proparco via la facilité FISEA+ du Groupe AFD, le fonds ARAF cible les thèmes de la sécurité alimentaire et du changement climatique. Il investit dans des start-up qui proposent des solutions innovantes afin d’améliorer les conditions et la résilience climatique des petits exploitants agricoles en Afrique de l’Est et de l’Ouest. Décryptages de Tamer El-Raghy, son dirigeant.

Le constat que dresse Tamer El-Raghy est sans appel. « Ici, l’évolution du climat fait des ravages », alerte depuis Nairobi celui qui dirige le fonds de capital-risque ARAF (Acumen Resilient Agriculture Fund) qui intervient dans plusieurs pays d’Afrique touchés par le changement climatique. Épisodes d’inondations intenses auxquels succèdent de longues périodes de sécheresse qui dégradent les zones cultivées… « Autant de dérèglements qui pèsent en particulier sur les plus faibles – les enfants, les femmes – et les agriculteurs les plus modestes qui ont très peu de moyens pour protéger et doper leurs plantations ». Cette forte exposition à ces phénomènes climatiques rend dès lors la performance du secteur agricole au Kenya – et partout ailleurs en Afrique subsaharienne – très instable, pointe cet expert diplômé des universités du Caire et de New York. « Plus de la moitié des personnes vivant dans la pauvreté sont en effet des petits exploitants agricoles. Ces derniers fournissent pourtant 80 % de la nourriture consommée dans la région ». C’est dire combien le changement climatique, auquel sont confrontées des centaines de milliers de paysans africains, fragilise les économies locales et accentue l’insécurité alimentaire.

 

30% DES BÉNÉFICIAIRES VIVENT EN DESSOUS DU SEUIL DE PAUVRETÉ

Face à cette situation, le fonds ARAF, lancé en 2020 par Acumen Capital-Partners – filiale d’Acumen, une organisation spécialisée dans le soutien aux entreprises sociales en Afrique –, investit dans des start-up locales qui proposent des solutions innovantes aux petits exploitants qui permettra aux agriculteurs d’Afrique de l’Est et de l’Ouest d’accroître leurs revenus, d’améliorer leurs conditions de vie et leur résilience au changement climatique. Une adaptation qui passe notamment par une diversification des cultures (maïs, légumes, etc.), une meilleure irrigation et par un accès facilité aux semences et aux espèces les plus résistantes au changement climatique. « Nous investissons actuellement dans six start-up et avons pour objectif cinq à sept investissements supplémentaires à terme, en 2026 », précise Tamer El-Raghy. « Nous visons les agriculteurs les plus fragiles. 30 % vivent en dessous du seuil de pauvreté. Par son action, l’ARAF cherche à réduire la pauvreté, à renforcer la résilience climatique et à démontrer l’impact de l’investissement dans une agriculture résiliente ». Soutenu par le Fonds vert pour le climat (FVC), l’ARAF est financé à hauteur de 58 millions de dollars par plusieurs partenaires et institutions de financement du développement, dont Proparco qui a pris une participation de 5 millions de dollars en 2021, par le biais de FISEA+, la facilité du Groupe AFD mise en œuvre par Proparco dans le cadre de l’initiative Choose Africa. D’ici 4 ans, le fonds entend maintenir près de 1 200 emplois et soutenir indirectement un total de 2 millions de petits exploitants agricoles.

 

L’impact du fonds ARAF sur le bien-être des exploitants agricoles

ARAF-données

PLUSIEURS RÉCOLTES CHAQUE ANNÉE

Sur le terrain, les équipes d’ARAF mesurent, à intervalles réguliers, les incidences sur la qualité de vie des agriculteurs ainsi que sur la pratique de leur métier. « Les actions des start-up que nous soutenons ont déjà impacté près de 400 000 exploitants agricoles d’Afrique subsaharienne. 43 % d’entre eux se disent désormais résilients pour faire face aux conséquences du changement climatique et 79 % considèrent que leurs revenus ont augmenté », détaille le directeur général du fonds. La start-up kenyane SunCulture – qui fournit à ses clients des systèmes d’irrigation solaires notamment – évalue quant à elle à 120 % en moyenne l’augmentation des revenus disponibles des exploitants agricoles qui bénéficient de ses innovations. C’est le cas de Josephine Waweru, agricultrice spécialisée dans la culture du café. Installée dans le comté de Kirinyaga, au centre du Kenya, elle a pu faire installer un système de pompes solaires fournit par SunCulture. « J’utilisais auparavant un système à essence très cher et polluant. J’ai pu également diversifier mes cultures pour mieux faire face aux aléas liés au changement climatique », témoigne l’agricultrice. Un constat également partagé par Jamleck Gichovi Karuri installé dans une autre région du Kenya particulièrement touchée par des vagues prolongées de sécheresse. Grâce à un système de pompes à eau solaire fournit par SunCulture, cet éleveur et agriculteur est désormais en capacité de nourrir son bétail et d’effectuer plusieurs récoltes chaque année.

 

DES PROGRÈS TECHNOLOGIQUES AU SERVICE DE L’AGRICULTURE

« Avec le changement climatique, les précipitations en Afrique subsaharienne ont diminué de plus de 100 mm par an depuis le milieu des années 1970 », relève Samir Ibrahim, cofondateur de SunCulture. Résultat : l’Afrique – qui abrite 65 % des terres arables non cultivées du monde – importe chaque année l’équivalent de 35 milliards de dollars de nourriture. Grâce aux progrès technologiques réalisés dans l’agriculture, le continent serait pourtant en mesure de nourrir sa population sans le moindre problème. « Ces progrès doivent pour cela aider en priorité les petits agriculteurs les plus exposés au changement climatique », rappelle Tamer El-Raghy. « C’est à la fois une nécessité et une urgence ».