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Dans le cadre de sa série « Innovation partagée », l’AFD met en lumière des programmes novateurs encouragés, créés ou développés dans nos pays partenaires.

Faire une place aux femmes dans l’entrepreneuriat en Afrique, la Malgache Matina Razafimahefa et la Camerounaise Nelly Chatue-Diop en ont fait un leitmotiv. Ces dirigeantes de start-up brisent le plafond de verre en innovant dans la formation numérique et la cryptomonnaie. Portraits croisés d’entrepreneuses audacieuses.

L’une est originaire de Madagascar et a grandi en Côte d’Ivoire. L’autre est née au Cameroun. Leur point commun : avoir suivi de brillantes études en France. Sciences politiques à la Sorbonne pour Matina ; école d’ingénieur en informatique, puis école de commerce pour Nelly. Autre lien entre ces deux femmes : elles sont retournées dans leur pays d’origine pour y créer leur propre entreprise.

Former aux métiers du numérique

En janvier 2018, grâce à 5 000 euros récoltés par le biais d’une campagne de financement participatif, Matina Razafimahefa fonde Sayna, « intelligence » en malgache. Cette plateforme propose, pour 9,90 euros par mois, des formations certifiées en ligne aux métiers du numérique. « Quand j’ai découvert que l’enseignement et l’accès aux livres pouvaient être quasiment gratuits en France, je me suis dit : pourquoi ne pas appliquer ce modèle à Madagascar en garantissant une formation de qualité en ligne et à moindres frais aux étudiants », confie l’entrepreneuse.

Grâce à un réseau d’une cinquantaine d’entreprises partenaires, la plateforme Sayna propose aussi des « micro-tâches » rémunérées à ses étudiants. Une manière de mieux s’insérer dans le marché de l’emploi par la suite. Quatre ans après son lancement, la start-up a réussi son pari. Soutenue par des bailleurs comme le fonds d’amorçage by Digital Africa, plus de 100 000 euros ont pu être levés. Avec ces fonds, Sayna a déjà formé près de 200 étudiants et 600 personnes sont actuellement sur liste d’attente.

De l’accès aux services bancaires

Passionnée par les mathématiques et la physique, Nelly Chatue-Diop s’intéresse aux cryptomonnaies qu’elle a découvertes en travaillant au sein de plusieurs entreprises majeures dans le secteur des nouvelles technologies. Mais la salariée s’ennuie très vite : « Au bout de quelques mois, j’ai pris conscience que faire de la tech sans participer aux décisions business m’intéressait peu. » 

En 2020, Nelly crée Ejara, un nom inspiré du mot jara, « lion » en bambara. Lorsqu’elle lance sa plateforme d’investissement et d’épargne mobile reposant sur la technologie de la chaîne de blocs, elle est l’une des rares femmes africaines à entreprendre dans ce domaine. Aujourd’hui, sa start-up compte une quinzaine d’employés basés essentiellement au Cameroun.


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Ejara a été créée pour permettre au grand public, et plus spécifiquement aux femmes, aux populations rurales et aux groupes communautaires d’accéder aux services bancaires grâce à une interface très simple. « L’utilisation d’une interface numérique et d’une monnaie apolitique, le Bitcoin, offrent des rendements plus élevés que les services financiers traditionnels », explique Nelly.

L’équipe n’hésite pas à démarcher les possibles intéressées : « Pour expliquer aux femmes en quoi notre outil peut leur être utile, nous sortons de nos bureaux et allons les trouver sur les marchés, dans la rue ou les associations, révèle Nelly, il est important qu’elles comprennent que notre plateforme leur offre la possibilité de disposer plus facilement de leurs ressources financières et de les faire fructifier. »

Être femme dans un monde d’hommes

Derrière les histoires à succès de Matina et de Nelly se cachent aussi des doutes et des difficultés. « En tant que femme dans la tech, tu te retrouves souvent seule face à des hommes qui se serrent les coudes, déplore Nelly. Dans le milieu des affaires, les femmes ne sont pas toujours prises au sérieux. Nous subissons souvent des remarques désobligeantes, voire sexistes. C’est toujours à nous de recadrer le débat. ». Cette méfiance à l’égard des femmes, Matina s’y confronte également dans son quotidien d’entrepreneuse. « En tant que jeune femme, il n’a pas toujours été facile de convaincre des hommes d’investir dans les ressources humaines et de développer la formation. »

Celle qui est également co-présidente de la French Tech à Antananarivo continue de mener ce combat dans le milieu professionnel mais aussi associatif. La jeune femme organise régulièrement des évènements pour favoriser l’intégration de la femme dans le milieu des nouvelles technologies. Chacune de leur côté, Matina et Nelly entraînent dans leur sillon une nouvelle génération de femmes grâce aux services qu’elles proposent. Et grâce au modèle que leurs parcours respectifs imposent.